samedi, novembre 23, 2024

Les mesh networks, les réseaux sans réseau

Publié dans La Tribune le 6 janvier 2015.



Nous assistons depuis quelques
mois à l’émergence de réseaux Mesh – c’est-à-dire de réseaux totalement décentralisés,
ne reposant pas sur les infrastructures des fournisseurs d’accès ou des
opérateurs téléphoniques.  Concrètement, grâce
aux réseaux Mesh, des personnes utilisant la même application, séparées l’une de l’autre par une distance allant jusqu’à 60 mètres environ, peuvent maintenant se connecter
sans passer par internet en créant une nouvelle infrastructure, dont la capacité augmente grâce à chaque nouvel utilisateur.


Un tel réseau n’utilisant que les moyens mobiles de ses utilisateurs sans passer par un point central, ces réseaux sont un excellent moyen, par exemple,
pour contourner la censure ! C’est dans ce cadre-là que l’application
FireChat a connu un essor particulièrement important lors des derniers
mouvements sociaux à Hong Kong. Alors que l’armée chinoise menaçait de bloquer
les contenus partagés sur les réseaux sociaux, l’AFP expliquait que
l’application Firechat aurait été 
téléchargée plus de 100 000 fois en 24heures (cf AFP,
le 1er octobre). En leur permettant de rester connectés alors même que
les réseaux habituels leurs faisaient défaut, l’application est devenu un outil
indispensable pour ces manifestants.


Outils puissants et efficaces permettant notamment de promouvoir
la démocratie lors de mouvements sociaux et de se défendre face à des gouvernements
autoritaires, les réseaux Mesh pourraient aussi permettre de communiquer et de
coordonner les efforts dans des situations d’urgences dans lesquelles les infrastructures classiques ne fonctionnent plus, tels que des désastres
naturels. Ces « nouveaux » réseaux s’avèreraient aussi être un
excellent moyen de connecter des milieux ruraux actuellement isolés, pour un
investissement relativement modeste, ou même des quartiers pauvres de pays en voie de développement.


Mais quelle différence avec les
logiciels Peer To Peer ? Ce dernier est en effet souvent définit comme
l’ancêtre du réseau Mesh, mais se sont en réalité des approches
complémentaires. Le Peer To Peer s’appuie sur un réseau classique mais c’est le logiciel de
partage d’information qui s’opére entre deux postes connectés au réseau, en utilisant internet – ce qui suppose de passer par des infrastructures d’un fournisseur d’accès. Les réseaux Mesh font communiquer une information en utilisant d’autres utilisateurs pour faire passer l’information, sans passer par un opérateur, ce qui réduit fortement les possibilités de contrôle. 


Ces deux phénomènes – l’évolution
d’applications Peer To Peer et la naissance des réseaux mesh – indiquent à quel
point les réseaux de communications ne cessent d’évoluer. De nouveaux
acteurs intègrent le marché pour optimiser les connections, qui deviennent de
plus en plus indispensable tant d’un point de vue pratique que
culturel !  Citons par exemple le
géant Open Garden, créateur de Firechat, qui développe des applications de
partage communautaire de connexion internet avec une transmission de données
ultra rapide. L’idée étant de faire des réseaux partagés l’internet de demain –
et d’accroître la connectivité des populations !


Et si
l’on prend en compte que le nombre d’utilisateurs mobiles a atteint plus de 1.4
milliard dans le monde (source ABI
Research
) et que les smartphones, généralement nécessaires pour ce type d’applications, sont de moins en moins chers (à partir d’une vingtaine d’euros), il n’est pas impossible que ce type d’application se développe fortement dans les années qui viennent – à commencer par là où les réseaux sont fortement contrôlés, ceux pour lequels les abonnements téléphoniques sont trop chers (les mesh apps n’utilisant pas la carte SIM)…



Laura Ghebali, pôle Technologie de l’Observatoire du Long Terme

À propos

Dédié à l'analyse des questions économiques, sociales et environnementales de long terme, L'Observatoire du Long Terme se fixe pour objectif de donner davantage de visibilité à ces enjeux dans le débat public. Dans ce contexte, il donne la parole à des contributeurs variés, avec pour seul critère le caractère étayé des arguments présentés.

L'Observatoire est indépendant, ne reçoit aucune aide financière et repose sur le volontariat de ses contributeurs, de son bureau, présidé par Vincent Champain et Bruno Fuchs.

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