Financement des projets présidentiels, ou comment détruire des emplois avec des mesures qui en créent

Francois Bayrou propose dans son projet d’exonérer de charges les deux premières embauches réalisées par toute entreprise.

Prise isolément, cette proposition aura nécessairement un effet positif sur l’emploi : en effet, même s’il est clair que ce type d’aide génère toujours des effets d’aubaine (beaucoup d’entreprises créent des emplois, et bénéficieront de cette aides pour des emplois qu’elles auraient créés de toutes facons), il n’en reste pas moins que le coût de ces embauches étant réduit (de 20 à 30 %), un certain nombre d’entreprises y auront recours pour des projets qu’elles n’auraient pas réalisés en temps normal.

Peut-on considérer pour autant que ce projet va créer des emplois ? En fait non, et c’est sans doute le contraire qui va se réaliser. En effet Francois Bayrou que l’une des sources de financement de son programme est la réduction des exonérations de cotisations sur les bas salaires. Or ces mesures sont, en matière d’exonération de cotisations, les dispositifs qui ont le rapport cout/emploi créé le plus favorable : en effet, elle ne concernent que les salaires les plus bas, pour lesquels le cout d’exonération par salarié est le plus faible, et pour lesquels l’impact d’une baisse de charge sur le niveau de l’emploi est le plus fort. En effet, l’embauche d’un salarié peu qualifié est plus facile à remplacer par une délocalisation ou une automatisation, et est contrainte par l’existence d’un salaire minimum, contrairement à celle d’un cadre supérieur : baisser le cout n’a donc pas grand effet sur la décision d’embauche dans le second cas, contrairment au premier.

Autrement dit la proposition de Francois bayrou reviendra à remplacer en partie une exonération relativement efficace (les exonérations sur les bas salaires) par une exonération qui aura sans doute un effet, mais moindre que l’exonération qu’il supprimera en contrepartie. Au total, l’effet sur l’emploi sera négatif (sans parler de l’effet lié à la création d’une exonération spéficique supplémentaire, s’ajoutant à une panoplie illisible d’environ une cinquantaine de dispopsitifs différents). Enfin, comme le signale justement Jean Pisani , on réduire également l’effet emploi des exonérations en donnant aux entreprise s le signal que, décidément, les aides accordées pour une embauche ne sont pas pérenne, et qu’il ne faut pas trop compter dessus dans ses décisions d’embauche à long terme.

Voilà comment ce projet va détruire des emplois en donnant l’impression d’en créer !

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