En France, où l’on affirme régulièrement l’accès à la culture pour tous, il suffirait de 60 millions par an pour doter tous les enfants d’un PC à 100 dollars – qu’il serait possible de financer grâce économies réalisées si cet outil servait aux familles dans leurs « télédéclarations » : la seule télédéclaration d’impôt faisant économiser plus de 20 euros par an à l’administration.
Ces deux initiatives mettent en évidence un nouveau défi pour l’administration : être capable d’innover, dans des conditions de coûts réalistes, et d’une façon qui répondent aux besoins du public. Actuellement, le secteur public est capable d’innover – il suffit pour s’en convaincre de consulter la listes des aides aux ménages ou aux entreprises, et de faire la liste des annonces des élus nationaux ou locaux. Même si son système comptable ne l’y pousse pas et si l’optimisation des coûts ne figurent pas au centre de la formation des cadres de la fonction publique (centrée sur les concours administratifs), le secteur est capable de produire des services à coûts raisonnables – c’est notamment le cas de
– d’abord, organiser une concurrence « sur les résultats » plutôt que sur la « capacité à durer » pour l’accès aux fonctions de décision. Il est en effet difficile d’innover dans un monopole, ce que constitue le système du parti poussé à son extrême. Il est difficile de disposer d’une classe politique diversifiée si l’accès aux candidatures est déterminé par la capacité à abandonner toute autre activité pour se consacrer aux rouages internes d’une section ou d’un parti. Il s’agit là d’un équilibre complexe : on ne gère un état ni comme un parti, ni comme une administration, ni comme une entreprise – mais ne le gère pas non plus de façon correcte si l’un de ces trois éléments dysfonctionne ;
– ensuite, il faut faire évoluer les formations publiques, et renoncer au gaspillage que constitue la concentration quasi exclusive des moyens de formation publique à la préparation aux concours – qui privilégient une approche conceptuelle et centralisée aux détriments de la capacité à exécuter et à faire exécuter des objectifs en tenant compte des besoins (notamment ceux que seuls l’agent de base peut identifier) ;
– en arrêtant de séparer les rôles d’exécution (souvent jugés secondaires) et les rôles « nobles » de régulation ou d’administration. Il est impossible d’innover dans un système centralisé, dans lequel quelques-uns se partagent l’information, l’analyse et la décision, et les autres doivent exécuter ou administrer. Si les mots ont un sens, alors le fait que les fonctions les plus prestigieuses du secteur public soient celles d’inspecteur, d’auditeur, de conseiller ou d’administrateur doit nous interroger !
– en organisant un mouvement massif de décentralisation et de transparence, afin de rapprocher la décision des besoins et de donner une transparence plus forte au coût réel des promesses et des réalisations. Celà suppose un effort massif de formation, de cohérence (notamment en tranchant les responsabilités entre les différents niveaux de collectivités, ce qui n’empêche pas certaines d’entre elles de se regrouper en « syndics » pour réaliser les tâches qu’elles jugent appropriées en commun), et une évolution du mode de contrôle (qui allie actuellement un controle a priori impossible à réaliser, et des audits à posteriori relativement généralistes et centrés sur des vérifications juridiques) ;
Enfin, à l’heure des annonces de « rupture », il faudrait surtout rompre avec les annonces : dès lors que les personnalités politiques seront jugées sur les annonces (qui alimentent leur plan média) plutôt que sur les résultats, il le sera impossible de mettre en oeuvre des réformes inspirées par un principe d’une triste banalité : ne dire ce que l’on fera, faire tout ce que l’on a dit.