Dette publique : entrée gratuite, sortie payante ?

La crise grecque a déclenché une spirale de doutes profonds sur les dettes publiques de l’ensemble de la zone euro. Comme souvent, les marchés et l’opinion sont passés d’un optimiste béat (l’augmentation de la dette et les faibles efforts de contrôle des déficits sont un fait depuis près de 40 ans, sans que grand monde ne s’en soit tellement soucié) à un pessimisme catastrophiste (même si le cas grec sortait de la norme, la zone euro, présente dans son ensemble un niveau de dette qui n’est pas insoutenable). Au passage, ceux qui ont accompagné ou profité de l’augmentation passée de la dette spéculent désormais sur son effondrement !

A titre personnel, je suis plutot partisan de comptes équilibrés, et pense qu’il est absolument nécessaire de veiller à l’équité entre générations. Mais il faut raison garder. D’abord, l’examen des épisodes de désendettement passés est relativement rassurant : peu de défauts, et de nombreux épisodes de réduction progressive. Comme le montre en effet l’excellent article  de S. M. A. Abbas, N. Belhocine, A. El-Ganainy et M. Horton, l’écrasante majorité des épisodes de désendettement public s’est faite sans défaut :

Comme le confirme une arithmétique simple, il n’y a pas besoin de faire des choses extraordinaires pour revenir à des niveaux de dette modérés : il suffit d’un point d’inflation supplémentaire sur 25 ans pour ramener la dette de 90 points de PIB à 70 points, et si l’on y ajoute un point de PIB d’effort budgétaire (en plus des efforts normalement prévus pour ramener le deficit au niveau où la dette se stabilise) sur la meme durée, la dette finit à 48 points de PIB…

Car la dette n’est un problème que lorsqu’il n’existe aucune issue pour la rembourser ou si son poids devient insoutenable. Ainsi, une personne disposant du revenu médian français (24.000 euros/an) et qui s’endette sur 30 ans pour acheter une maison à 160.000 euros a au début une dette égale à 666 % de son « PIB » à elle. Des cas comme celui-ci il y en a des centaines de milliers par an sans que celà ne mette en risque le système bancaire !

Le problème ne se pose que si la personne en question se met à trop dépenser (et n’a plus assez d’argent pour rembourser ses mensualités), ou si son revenu n’augmente pas assez par rapport au niveau de la dette (ce qui revient à dire que l’inflation n’est pas suffisante). Mais tant que la maison est solide, la dette n’est pas une soucis, dès lors que chacun est convaincu qu’elle se place sur un chemin de maîtrise crédible et juste, notamment vis-à-vis des générations futures.

À propos

Dédié à l'analyse des questions économiques, sociales et environnementales de long terme, L'Observatoire du Long Terme se fixe pour objectif de donner davantage de visibilité à ces enjeux dans le débat public. Dans ce contexte, il donne la parole à des contributeurs variés, avec pour seul critère le caractère étayé des arguments présentés.

L'Observatoire est indépendant, ne reçoit aucune aide financière et repose sur le volontariat de ses contributeurs, de son bureau, présidé par Vincent Champain et Bruno Fuchs.

Sur le même sujet

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Du même auteur

Le malheur est dans le pré.

Analyses statistiques : Un modèle linéaire explique 11% des écarts de vote:- plus la densité, la part des jeunes, le chomage ou le revenu augmentent,...

Impact climat de l’IA : raison garder.

Publié dans Les Echos le 31 mai 2024. D’après l’Agence Internationale de l’Energie, les centres de données ont consommé 460 térawattheures  (TWh) dans le monde...

Gérer le biais technologique pour ne pas le subir

Publié dans Les Echos le 9/4/2024 Accepterions-nous une technologie qui améliore l’accès à la santé, à l’éducation et réduit l’isolement dans le monde mais au...

Simplifier dans la durée

Publié dans Les Echos le 8 février 2024. Le coût de la complexité administrative est estimé à près de 5 points de PIB, et il...