Dans « L’homme et le marché », j’évoquais les quatre piliers d’un gouvernement – comprendre, réunir, créer et répartir.
Plusieurs leviers peuvent permettre la création de richesse supplémentaires, mais les politiques industrielles (au sens anglo-saxon, c’est à dire les politiques publiques visant à développer autant les services que l’industrie ou l’agriculture) sont la voie le plus mise en avant. Ce débat sépare généralement ceux qui estiment qu’il vaut mieux ne rien faire – le bilan des politiques passées étant au mieux neutre et les moyens de l’Etat limités – et ceux qui estiment qu’avec du volontarisme tout est possible – les questions de coût ou de rendement étant secondaires.
Il est vrai que les contraintes de finances publiques, le développement des accords de libre échange (posant des limites à la discrimination favorable aux « champions nationaux ») ou les analyses du bilan des politiques interventionnistes (mitigé, avec des succès comme Airbus, mais également des échecs comme Concorde, Minitel,…) ont poussé beaucoup d’analyste à voir la fin des politiques industrielles.
Mais c’est oublier d’autres voies d’interventions, beaucoup moins couteuses et pas forcément moins efficaces telles que :
– la coordination entre les stratégies publiques et les stratégies privées, dans des secteurs fortement régulés. C’est le cas notamment pour les industries de santé, ou les « utilities » (eau, services aux collectivités,…) pour lesquelles une structuration intelligente peut être source d’avantage concurrentiel au niveau mondial ;
– l’appui international des intérêts nationaux, comme c’est le cas notamment pour l’Allemagne dans le domaine des normes techniques, favorisant les produits allemands de qualité ;
– l’innovation dans le secteur public, à l’exemple de l’appui des autorités américaines au développement des puces RFID ;
– le développement au Japon des industries liées au vieillissement, notamment robotique, par un effort concerté entre le gouvernement (dans un rôle de stratége et de coordonnateur de grands projets) et les industriels
Ces outils peuvent avoir une puissance considérable, qui peut être utilisée pour le bien comme pour le mal : l’insuffisance de normes dans le domaine de la finance, initialement pensée pour favoriser le développement d’une industrie, représente sans doute l’erreur de politique industrielle la plus coûteuse de tous les temps. Il existe également des exemples en Europe, dans le secteur de l’énergie, de gouvernements qui ont poussé des normes inadaptées ou excessives dans le but de favoriser son industrie, mais aux détriments des consommateurs.
Ainsi cette « nouvelle voie » n’échappe pas, comme les précédentes, au risque d’abus. Comme pour les précédentes, leur efficacité repose avant tout sur l’intelligence, et le gout pour l’intérêt général de ceux qui les utilisent…